DÉNIGREMENT : SANCTION DE LA LETTRE DE MISE EN DEMEURE INFORMANT DES REVENDEURS D’UNE «POSSIBLE CONTREFACON»

Type

Veille juridique

Date de publication

6 novembre 2025

Cass. com., 15 octobre 2025, n° 24-11.150, publié au Bulletin

IMPACT : Par cet arrêt, la Cour de cassation considère que l’information adressée par un titulaire de droits d’auteurs à des tiers sur l’existence d’une « possible contrefaçon de ses propres produits et d’actes susceptibles de relever de la concurrence déloyale et parasitaire » constitue un acte de dénigrement lorsqu’elle n’est pas fondée sur une décision de justice préalable.

Partant, la Cour de cassation sanctionne l’envoi d’une lettre de mise en demeure comportant l’indication selon laquelle la commercialisation des produits litigieux était « de nature à constituer un acte de contrefaçon de droit d’auteur » ou que de tels actes de vente sont « à tout le moins, susceptibles d’être qualifiés d’acte de concurrence déloyale et parasitaire ».

  • Les faits

Par ordonnance du 22 septembre 2022, signifiée et exécutée le 9 novembre 2022, la société KOSHI a été autorisée à faire pratiquer une saisie-contrefaçon de droits d’auteur au préjudice de la société MANUFACTURE DU MARRONNIER, laquelle avait confié à la société VBV INTERNATIONAL une prestation de fabrication, de stockage et de distribution de carillons à vent en bois.

Le 15 novembre 2022, la société KOSHI a adressé à plusieurs distributeurs des sociétés MANUFACTURE DU MARRONNIER et VBV INTERNATIONAL une lettre de mise en demeure de cesser immédiatement d’offrir à la vente ces carillons et de les promouvoir sur leur site internet, ainsi que de lui communiquer les documents contractuels y afférents.

Cette lettre indiquait notamment que la gamme de carillons « Heola » reprenait « les caractéristiques essentielles des carillons KOSHI » ce qui était « de nature à constituer un acte de contrefaçon de droit d’auteur » et indiquaient également que de tels actes étaient « à tout le moins susceptibles d’être qualifiés d’acte de concurrence déloyale et parasitaire ».

Les destinataires étaient invités à « cesser immédiatement d’offrir à la vente » et à « communiquer toutes les informations nécessaires » afin de déterminer les quantités achetées, vendues et en stock, à défaut de quoi la société KOSHI et son dirigeant indiquaient reprendre leur « entière liberté d’action, notamment en prenant toutes mesures nécessaires, en particulier sur le plan judiciaire ».

Les sociétés MANUFACTURE DU MARRONNIER et VBV INTERNATIONAL ont assigné en référé la société KOSHI aux fins de voir ordonner la cessation du trouble manifestement illicite constitué par l’envoi de cette lettre et le versement d’une provision à valoir sur des dommages et intérêts pour dénigrement des produits fabriqués et commercialisés par ces sociétés.

Par arrêt en date du 9 novembre 2023, la cour d’appel de Montpellier a rejeté leurs demandes, conduisant les les sociétés MANUFACTURE DU MARRONNIER et VBV INTERNATIONAL à former un pourvoi en cassation

  • Dénigrement en cas d’information du tiers d’une « possible contrefaçon »

Sur le fondement de l’article 1240 du code civil, la Cour de cassation retient que le dénigrement est caractérisé dès lors « qu’en l’absence de décision de justice retenant l’existence d’actes de contrefaçon de droits d’auteur, le seul fait d’informer des tiers d’une possible contrefaçon de ces droits est constitutif d’un dénigrement des produits argués de contrefaçon ».

Le fait de faire part à un tiers à une procédure judiciaire d’une « possible contrefaçon » peut donc désormais être constitutif de dénigrement.  

En l’espèce, la société KOSHI a adressé une mise en demeure à 12 revendeurs des sociétés MANUFACTURE DU MARRONNIER et VBV INTERNATIONAL. La société KOSHI leur a exposé des éléments présentés comme factuels relatifs à l’existence de son droit d’auteur et a soutenu que la vente des produits visés était « de nature à constituer un acte de contrefaçon de droit d’auteur », ou que de tels actes de vente étaient, « à tout le moins, susceptibles d’être qualifiés d’acte de concurrence déloyale et parasitaire ».

Elle les a enfin informés de ce qu’elle se réservait la possibilité de prendre toute mesure judiciaire à leur encontre afin de protéger ses droits et solliciter réparation de son préjudice.

La Cour de cassation a considéré que la cour d’appel de Montpellier, en retenant que ces propos étaient mesurés et non comminatoires, et, par conséquent, non constitutifs d’un acte de dénigrement, a violé l’article 1240 du code civil.

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