Brevets – Vers une brevetabilité plus aisée des inventions mises en œuvre par ordinateurs

Type

Veille juridique

Date de publication

31 mai 2023

Cass. Com. 11 janvier 2023, n° 19-19.567 & Cass. Com. 11 janvier 2023, n° 20-10.935 – La Cour de cassation a rendu deux arrêts le 11 janvier 2023 en faveur de la reconnaissance des moyens techniques des programmes d’ordinateurs et donc de leur brevetabilité.

En principe, en matière d’inventions mises en œuvre par ordinateur, l’article L. 611-10 du Code de la propriété intellectuelle prévoit que « ne sont pas considérées comme des inventions (…) les programmes d’ordinateurs » ni « les présentations d’informations ». Le paragraphe 3 de ce même article précise toutefois que ne sont exclus de la brevetabilité que les brevets concernant « l’un de ces éléments en tant que tel ». En ce sens, un logiciel pourrait en principe être brevetable uniquement si l’invention en cause présente des moyens techniques.

Dans le premier arrêt (Cass. Com. 11 janvier 2023, n° 20-10.935), il est question d’une demande de brevet déposée par la société BULL portant sur un « terminal pour l’établissement de communications par diffusion à l’intérieur d’un groupe ». L’invention, d’application militaire, avait pour objet de pouvoir transmettre des informations sur l’état de chaque combattant d’une troupe et ainsi de permettre d’avoir une vision d’ensemble.

Dans le second arrêt (Cass. Com. 11 janvier 2023, n° 19-19.567), le brevet était déposé par la société THALES et portait sur un procédé d’affichage temporel de la mission d’un aéronef. L’objectif de ce brevet était d’améliorer l’affichage d’informations dans les cockpits afin de faciliter la lecture et la corrélation des données relatives aux étapes d’une mission d’aéronef.

Les deux demandes de brevets ont été rejetées par décision du directeur de l’INPI pour défaut de caractère technique.

A la suite d’un appel, la Cour d’appel a annulé ces décisions considérant que les deux demandes de brevet comportaient bel et bien un caractère technique.

Dans les deux affaires, le directeur de l’INPI a formé un pourvoi en cassation.

Dans l’affaire « THALES », la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel faute de base légale, en retenant que celle-ci s’était limitée à affirmer l’existence d’un caractère technique sans expliquer en quoi les moyens revendiqués avaient le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d’informations.  

Dans l’affaire « BULL », la Cour de cassation a rejeté le pourvoi critiquant l’arrêt de la Cour d’appel de Paris estimant qu’il n’était pas manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

La Cour de cassation semble se montrer favorable à la brevetabilité des inventions mises en œuvre par ordinateur, uniquement si l’appréciation du caractère technique de la demande de brevet est bien motivée.

Les deux arrêts de la Haute Juridiction rendus le 11 janvier 2023 sont débattus car l’activité inventive des deux demandes de brevet paraissait assez faible. Ils témoignent cependant selon les commentateurs de l’alignement de la jurisprudence française sur la pratique de l’Office européen des brevets quant à l’admission de la brevetabilité des inventions mises en œuvre par ordinateur sous l’angle de l’activité inventive.

Il est important de garder à l’esprit que ces deux affaires ont été introduites avant l’entrée en vigueur de la loi PACTE. Désormais, l’article L. 612-12 7° du Code de la propriété intellectuelle prévoit la conduite par l’INPI d’un examen de l’activité inventive de la demande de brevet , ce qui n’était pas le cas lors de l’examen des brevets Bull et Thalès. Il est possible que la conduite d’un tel examen aurait conduit à écarter le caractère brevetable des deux inventions en question.

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