La forme de la notification aux hébergeurs : des appréciations différentes selon les juridictions

Type

Propriété intellectuelle / Nouvelles technologies / Communication

Date de publication

11 juillet 2012

En vertu de l’article 6-I-7 de la Loi pour la confiance dans l’économie numérique, les hébergeurs ne sont pas soumis à une obligation générale de surveiller les informations qu’ils stockent.

Néanmoins et sous peine de voir leur responsabilité engagée, l’alinéa 2 du même article leur fait obligation de retirer promptement les données ou d’en rendre l’accès impossible dès que le caractère illicite de ces dernières est parvenu à leur connaissance.

En vertu de l’alinéa 5, les hébergeurs sont présumés avoir connaissance des faits litigieux lorsqu’il leur est notifié les éléments suivants :

– la date de la notification ;
– si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;
– les nom et domicile du destinataire ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
– la description des faits litigieux et leur localisation précise ;
– les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;
– la copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté

En pratique, il est fréquent que l’hébergeur se voit enjoindre par une ordonnance judiciaire de communiquer à la partie plaignante les données d’identification de l’auteur de la mise en ligne du contenu, conservées sur le fondement du décret du 25 février 2011, et ce, en vue d’identifier ce dernier et de lui adresser une mise en demeure, document visé par la notification à l’hébergeur.

Une question essentielle est alors la détermination du moment de la prise de connaissance du caractère illicite par l’hébergeur.

Deux arrêts récents ont pris position sur la question, en donnant une appréciation différente sur la forme de la notification.

1) La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 9 mai 2012, a considéré que dès la signification de l’ordonnance sur requête lui enjoignant de communiquer les éléments d’identification de l’auteur de la mise en ligne des contenus, l’hébergeur avait eu la connaissance effective des contenus illicites. En l’espèce, l’hébergeur contestait avoir eu connaissance des contenus et faisait valoir que les éléments de localisation de ces derniers ne lui avaient pas été transmis avec la signification de l’ordonnance, rendant leur retrait impossible.

Néanmoins, les juges ont constaté que la requête jointe à l’ordonnance contenait tous les éléments d’information permettant d’identifier et de localiser les contenus : dénomination, siège social de la société de production, découpage du film, justification des droits et url.

En dépit de cette connaissance, l’hébergeur n’avait pas retiré promptement les vidéos litigieuses, ce qui constituait une faute engageant sa responsabilité.

2) La Cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 10 mai 2012, considère elle que la présomption de connaissance des faits litigieux ne peut s’appliquer lorsque la notification ne respecte pas un certain formalisme.

En l’espèce, les juges relèvent que la notification ne mentionnant que le nom et le prénom du plaignant, ne comportait aucun élément d’identification du mandant. Ils soulignent l’absence d’informations relatives à sa profession, à son domicile, à sa nationalité ainsi qu’à sa date et à son lieu de naissance.

La Cour d’appel de Bordeaux est donc plus exigeante que la Cour d’appel de Paris dans l’arrêt précédent, en ce qui concerne la forme de la notification aux hébergeurs.

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