Loi Avenir Professionnel : refonte du régime de la formation professionnelle continue

Type

Droit social

Date de publication

31 octobre 2018

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel (dite loi « Avenir Professionnel ») adoptée dans le prolongement de la réforme du Code du travail de septembre 2017 et entrée en vigueur le 7 septembre 2018, a opéré une refonte du régime de la formation, en plaçant la valorisation et le développement des compétences des salariés, notamment des personnes handicapées et des jeunes, au centre du processus. Ainsi, la loi vise à encourager le recours à l’apprentissage et à en faire un pilier de la formation (limite d’âge repoussée, conclusion et rupture du contrat simplifié, durée du travail aménagée, etc.).

Cette loi réforme également en profondeur la formation professionnelle continue. Les nouvelles dispositions doivent être précisées par une série de décrets d’application, dont les premiers projets sont en cours d’adoption pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2019.

Cette réforme est l’occasion de revenir sur les principes généraux de la formation professionnelle continue, avant d’évoquer les principales nouveautés apportées par la loi « Avenir Professionnel ».

Principes généraux de la formation professionnelle continue

La formation professionnelle continue a pour objet de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle des travailleurs, de permettre leur maintien dans l’emploi, de favoriser le développement de leurs compétences et l’accès aux différents niveaux de la qualification professionnelle, de contribuer au développement économique et culturel, à la sécurisation des parcours professionnels et à leur promotion sociale (article L. 6311-1 du Code du travail).

L’employeur concourt au développement de la formation professionnelle continue, selon deux modalités principales :

  • Versements de contributions à l’Organisme Paritaire Collecteur Agréé (OPCA). Toutes les entreprises doivent verser à l’OPCA, organisme chargé de collecter les contributions financières de l’employeur en matière de formation professionnelle, des contributions dont le taux varie en fonction de leur effectif (0,55% du montant des rémunérations versées pendant l’année pour les entreprises de moins de 11 salariés, et 1% pour les entreprises de 11 salariés et plus).
  • Prise en charge de formations pour ses salariés . Pour remplir son obligation en matière de formation (article L. 6321-1 du Code du travail), l’employeur peut également être amené à financer des formations ayant pour but l’adaptation des salariés à leur poste de travail, le maintien de leur capacité à occuper un emploi, le développement des compétences et la lutte contre l’illettrisme. Depuis la suppression en 2014 de l’obligation pour les entreprises d’au moins 10 salariés de consacrer annuellement 0,9 % de leur masse salariale pour financier des actions de formation, l’employeur détermine librement le budget des formations qu’il organise à ce titre.

La formation professionnelle continue peut ainsi être mise en œuvre à l’initiative de l’employeur, dans le cadre du plan de formation de l’entreprise qui devient le « Plan de Développement des Compétences », mais aussi à l’initiative du salarié, dans le cadre du Compte personnel de formation (« CPF », voir ci-après), qui a substitué le Droit individuel à la formation (« DIF ») depuis 2015.

Par ailleurs, les salariés doivent bénéficier tous les deux ans d’un entretien professionnel avec leur employeur, destiné à envisager leurs perspectives d’évolution professionnelle et les formations qui pourraient y contribuer.

Principales nouveautés de la loi Avenir Professionnel

  • La loi Avenir Professionnel définit la formation professionnelle « comme un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel ». Cette notion générale se substitue à la liste des 15 catégories d’actions de formation dont pouvaient bénéficier les salariés dans le cadre de la formation professionnelle continue, ce qui apporte plus de flexibilité dans le choix des formations, qui peuvent désormais se dérouler en tout ou partie à distance ou dans le cadre d’une formation réalisée en situation de travail (FEST) par exemple (article L. 6313-2 du Code du travail dans sa version à venir au 1er janvier 2019).
  • Le « Plan de Développement des Compétences » remplace le « plan de formation » (article L. 6312-1 du Code du travail). Ce document, établi par l’employeur, recense l’ensemble des actions de formation organisées à son initiative au bénéfice du personnel de l’entreprise. Contrairement au plan de formation, le plan de développement des compétences ne devra plus nécessairement distinguer les actions d’adaptation au poste de travail ou liées à l’évolution ou au maintien dans l’emploi d’une part, et les actions de développement des compétences d’autre part.

Le régime est donc unifié et toutes les formations seront désormais considérées, sans distinction, comme du temps de travail effectif donnant lieu au maintien de la rémunération, à l’exception des actions de formation qui peuvent se dérouler, en tout ou partie, hors du temps de travail (articles L. 6321-2 et L. 6321-6 du Code du travail dans leur version à venir au 1er janvier 2019).

  • Le Compte Personnel de Formation jusque-là alimenté en heures, sera désormais crédité en euros. Un décret d’application devra préciser le montant du crédit annuel de formation ainsi que les modalités de conversion des heures déjà inscrites.

De plus, les salariés à mi-temps bénéficieront désormais du même crédit annuel que les salariés à temps plein. Seuls les salariés dont la durée du travail est inférieure à un mi-temps acquerront des crédits au prorata. Certaines catégories de salariés bénéficieront à l’inverse d’un crédit annuel majoré (salariés non qualifiés, travailleurs handicapés). Enfin, des modalités d’alimentation plus favorables du CPF pourront être prévues par accord collectif.

L’accord de l’employeur sur la formation réalisée sur le temps de travail ne sera plus nécessaire. Seule une autorisation d’absence devra être demandée et l’absence de réponse de l’employeur dans un délai qui sera fixé par décret vaudra acceptation (article L. 6323-17 du Code du travail dans sa version à venir au 1er janvier 2019).

En outre, à l’ère de la digitalisation, la loi prévoit la possibilité pour le salarié de gérer son compte personnel de formation de manière dématérialisée, via une application mobile qui lui permettra notamment de prendre connaissance du montant des droits inscrits sur son compte et d’obtenir des informations sur les formations éligibles. Cette application mobile permettra également d’assurer la prise en charge des actions de formation, de l’inscription jusqu’au paiement des organismes de formation et devrait être disponible courant 2019.

  • Le mécanisme du Congé Individuel de Formation qui permettait au salarié de s’absenter afin de suivre une formation pour se qualifier, évoluer ou se reconvertir, est supprimé au profit du Projet de Transition Professionnelle, nouvelle modalité de mobilisation du Compte personnel de formation, dont les modalités de prise en charge financière seront précisées par décret.

La loi Avenir Professionnel marque également la suppression du congé pour bilan de compétence, du congé de formation pour les salariés de moins de 25 ans ainsi que du congé d’enseignement et de recherche.

  • Les OPCA sont remplacés par les « Opérateurs de Compétence » (OPCO), qui conserveront leur compétence dans les entreprises de moins de 50 salariés, notamment en matière de prise en charge et de gestion des fonds. En revanche, dans les entreprises de plus de 50 salariés, ces compétences seront désormais dévolues à l’employeur. L’objectif affiché est de rendre la formation plus accessible en réduisant le rôle d’intermédiaire des OPCO. De plus, les contributions seront à terme recouvrées par les URSSAF et non plus par les OPCO. Des décrets à paraître détermineront les modalités de ces nouvelles dispositions.

Les décrets d’application devant préciser ces nouvelles dispositions devraient être publiés, selon un échéancier de mise en application de la loi qui vient d’être publié, dès novembre 2018.

A noter que la loi « Avenir Professionnel » contient également des dispositions en matière d’emploi précaires, en intégrant notamment au Code du travail le « CDI intérimaire » (CDII), en expérimentation depuis la loi Rebsamen du 17 août 2015. Ce nouveau type de contrat de travail permet à une entreprise de travail temporaire de conclure, pour l’exécution de missions successives, un CDI avec le salarié.

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