Accords verticaux anticoncurrentiels « par objet » : grille d’analyse de la Cour de justice

Type

Droits des contrats - distribution - concurrence - consommation

Date de publication

4 juin 2013

Dans un arrêt du 14 mars 2013, la Cour de justice de l’Union européenne, saisie sur renvoi préjudiciel, a eu à connaitre d’accords verticaux conclus dans le secteur de l’assurance automobile (Allianz Hungaria, C-32/11).

En l’espèce, des sociétés d’assurance ont conclu des accords avec des concessionnaires automobiles agissant à un double titre : courtiers en assurance et ateliers de réparation de véhicules sinistrés. Ces accords prévoient de majorer le taux horaire payé par les sociétés d’assurance pour la réparation de véhicules sinistrés en fonction, entre autres, du nombre et de la proportion de contrats d’assurance commercialisés par les concessionnaires automobiles en qualité de courtiers.

La question soumise à la Cour de justice était celle de savoir si de tels accords peuvent être considérés comme une restriction de la concurrence « par objet ».

La Cour de justice a livré à la juridiction de renvoi les éléments d’appréciation d’une telle restriction de concurrence. La juridiction de renvoi devra ainsi examiner la teneur des dispositions de l’accord, les objectifs qu’il vise à atteindre ainsi que le contexte économique et juridique dans lequel il s’insère. Par ailleurs, la Cour a indiqué qu’il y a lieu de prendre en considération la nature des biens ou des services affectés ainsi que les conditions réelles du fonctionnement et de la structure du marché ou des marchés en question. Enfin, la Cour a précisé qu’il n’était pas nécessaire de rechercher l’intention des parties mais que rien n’interdisait aux autorités nationales de concurrence d’en tenir compte.

La Cour de justice a rappelé qu’un accord vertical, bien que souvent moins nuisible pour la concurrence qu’un accord horizontal, peut avoir un objet anticoncurrentiel, c’est-à-dire posséder « un potentiel restrictif particulièrement élevé ».

En outre, la Cour a souligné que l’accord est susceptible d’affecter deux marchés. Dès lors, l’objet des accords devra être apprécié au regard du marché de l’assurance automobile et au regard du marché des services de réparation des véhicules sinistrés.

S’agissant du marché des assurances automobiles, la Cour a invité la juridiction de renvoi à rechercher si les accords litigieux révèlent un degré suffisant de nocivité pour constituer une restriction « par objet ». La Cour a indiqué que tel pourrait être le cas si l’absence d’indépendance des concessionnaires automobiles, agissant en qualité de courtiers, est susceptible de perturber de manière significative le bon fonctionnement du marché des assurances automobiles et s’il est probable que la concurrence sera éliminée ou gravement affaiblie à la suite de la conclusion des accords.

S’agissant du marché des services de réparation des véhicules sinistrés, la Cour a estimé que si les accords avaient effectivement pour objet de restreindre la concurrence en uniformisant les taux horaires pour la réparation de véhicules sinistrés, sur la base de « prix conseillés », la juridiction de renvoi devrait considérer ces accords comme une restriction de concurrence « par objet ».

Le Cour de justice a finalement conclu en affirmant que les accords litigieux pourront être considérés comme une restriction de la concurrence « par objet » si, « à la suite d’un examen individuel et concret de la teneur et de l’objectif de ces accords, ainsi que du contexte économique et juridique dans lequel ils s’inscrivent, il apparaît que ceux-ci sont, par leur nature même, nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence sur l’un des deux marchés concernés ».

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