Droit d’auteur – L’originalité de plusieurs photographies doit s’apprécier selon un examen détaillé, photographie par photographie

Type

Veille juridique

Date de publication

22 octobre 2020

Cour d’appel de Paris, 19 juin 2020, n°19-02523

Cette affaire s’inscrit dans la continuité de décisions récentes, qui contribuent à préciser le degré d’originalité requis et la méthode d’appréciation que les juges doivent adopter s’agissant de la protection des œuvres photographiques par le droit d’auteur.

En l’espèce, une photographe avait cédé à la société Des Editions Mengès, ses droits de reproduction sur 48 de ses photographies qui avaiet été reproduites en illustration d’un ouvrage sur les monuments architecturaux de Paris.

Constatant que la société Des Editions Mengès avait procédé à la réédition de cet ouvrage au-delà de la durée prévue pour la cession de ses droits, la photographe a agi en contrefaçon de ses droits d’auteur.

Dans un premier temps, le Tribunal de grande instance de Paris avait débouté la photographe de ses demandes, considérant que les photographies en cause n’étaient pas protégeables au titre du droit d’auteur. Le Tribunal avait retenu que les choix de cadrage et de luminosité relevaient uniquement d’un savoir-faire technique, ne laissant ainsi pas de place à un parti pris créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteure.

La Cour d’appel infirme cette décision et condamne la société Des Editions Mengès pour contrefaçon, après avoir procédé à un examen méthodique des photographies en cause afin de retenir leur originalité.

Tout d’abord, la Cour indique avoir examiné individuellement chacune des 48 photographies reproduites, avant de conclure que l’auteure a bien su justifier pour chacune d’elle ses « choix délibérés tenant à l’instant et à l’angle de prise de vue, au cadrage, au jeu de la lumière » et aux volumes. Elle détaille ainsi précisément les éléments qui confèrent aux photographies leur originalité. Dans une autre affaire récente, la Cour de Cassation avait déjà insisté sur la nécessité d’une appréciation distincte de chacune des œuvres, rejetant l’appréciation globale de l’originalité alors même que l’originalité de 8000 photographies était concernée (Cass.Com 5 avril 2018, n°13-21001).

Ensuite, la Cour rejette l’analyse de la société Des Editions Mengès qui comparait les 48 photographies aux visuels des mêmes monuments que ceux photographiés, présents sur le moteur de recherche Google. Ces visuels avaient été produits par celle-ci afin de démontrer que les photographies en cause n’étaient sont pas originales car elles relevaient du fonds commun des photographies du même genre.

Or, suivant la comparaison opérée par la Cour, les photographies en cause présentent « une physionomie particulière et une impression distincte  » des éléments du fonds commun. En tout état de cause, la Cour d’appel de Paris a pu considérer, pour des clichés représentant une foule et des interprètes lors de spectacles musicaux, que de telles photographies étaient originales bien que composées uniquement d’éléments du fonds commun, dès lors que leur combinaison telle que revendiquée leur conférait une physionomie propre (Cour d’appel de Paris, 9 novembre 2018, n°17-11524).

La société Des Editions Mengès est ainsi condamnée à payer à la photographe la somme de 18.000€ de dommages et intérêts en réparation des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur.

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