Droits voisins : Affirmation de l’autonomie des droits voisins du producteur de vidéogrammes sur les rushes

Type

Veille juridique

Date de publication

31 janvier 2022

Civ. 1re, 16 juin 2021, n° 19-21.663

La Cour de cassation affirme qu’au titre de ses droits voisins, le producteur de vidéogrammes est titulaire du droit d’autoriser l’exploitation des rushes dont il a eu l’initiative et la responsabilité de la première fixation.

Afin de célébrer le centenaire de la formulation de la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein, une université (l’UPMC), agissant pour le compte de l’un de ses instituts internes (l’IHP), a proposé à la société Look at Sciences de produire une œuvre audiovisuelle intitulée « Einstein et la relativité générale, une histoire singulière ».

Le producteur a d’abord conclu avec le réalisateur un contrat de cession de droits d’auteur qui prévoyait notamment en son article 13 qu’aucune partie ne pourra exploiter les rushes non montés, c’est-à-dire les épreuves de tournage non comprises dans la version définitive de l’œuvre, sans autorisation réciproque, expresse et préalable de l’autre partie. Puis, l’université et le producteur ont conclu une convention de cession des droits d’exploitation non commerciale pour une durée illimitée et sur tout support en vue de la représentation de l’œuvre dans le cadre des activités d’enseignement et de recherche, et ce en contrepartie du financement que l’université lui apportait.

Par la suite, le producteur s’est aperçu que des éléments des rushes non compris dans la version définitive du film étaient reproduits sur des DVD, édités et distribués par l’IHP, sans que son autorisation n’ait été donnée. Il a alors assigné l’université en contrefaçon de droits d’auteur, en responsabilité contractuelle et en concurrence déloyale et parasitisme.

Dans son arrêt du 17 mai 2019, la Cour d’appel de Paris a considéré qu’en l’absence d’autorisation du réalisateur pour exploiter les rushes, le producteur était irrecevable à agir au titre des épreuves non montées du tournage. La Cour a déclaré que le producteur d’un vidéogramme ne peut « en tout état de cause détenir plus de droits que le producteur de ladite œuvre sur des épreuves de tournage non montées ».

Le producteur s’est alors pourvu en cassation. La Haute juridiction a cassé l’arrêt au visa de l’articles L. 215-1 du code de la propriété intellectuelle.

Pour mémoire, l’article L. 215-1 du code de la propriété intellectuelle, qui ne suscite que peu de jurisprudence de la part de la Cour de cassation, prévoit notamment que « L’autorisation du producteur de vidéogrammes est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, l’échange ou le louage, ou communication au public de son vidéogramme ».

La Cour de cassation a énoncé de façon claire et concise que la Cour d’appel a confondu les droits voisins, dont disposait le producteur sur les rushes, et les droits d’auteur dont les rushes peuvent faire l’objet. Elle a affirmé l’autonomie des droits voisins en précisant que «  le producteur de vidéogrammes est titulaire du droit d’autoriser la reproduction, la mise à la disposition ou la communication au public des épreuves de tournage non montées ou rushes dont il a eu l’initiative et la responsabilité de la première fixation ».

Au titre de ses droits voisins, le producteur était donc en droit d’interdire toute reproduction ou communication au public des rushes relatifs au documentaire sur Albert Einstein.

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