Le Lanceur d’alerte : la loi Waserman (3/4)

Type

Veille juridique

Date de publication

8 avril 2022

La loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 dite “Waserman” transpose la directive européenne du 23 octobre 2019 et renforce le statut protecteur du lanceur d’alerte.

Elle modifie la définition donnée au lanceur d’alerte, qui est désormais la suivante : «  une personne physique qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, du droit de l’Union européenne, de la loi ou du règlement ».

Ce troisième billet présente les apports de la loi Waserman, présentant les nouveaux éléments qui caractérisent le statut du lanceur d’alerte :

Concernant l’auteur de l’alerte, la réforme élargit les conditions pour en recevoir la qualité :

  • Seule une personne physique peut désormais être lanceur d’alerte, ce qui exclut les personnes morales telles que les associations par exemple ;
  • Le lanceur d’alerte ne doit pas recevoir de « contrepartie financière directe », cette précision apporte un assouplissement des dispositions anciennes qui prévoyaient que le lanceur d’alerte devait être, de manière plus générale, « désintéressé » ;
  • La condition relative à la connaissance personnelle de l’information révélée est supprimée, le lanceur d’alerte peut divulguer une information qui lui a été rapportée dans le cadre professionnel ;
  • L’entourage du lanceur d’alerte peut enfin bénéficier d’une protection. Il s’agit d’une part, des « facilitateurs », c’est-à-dire les personnes physiques ou morales de droit privé à but non lucratif qui apportent leur aide au lanceur d’alerte ; et d’autre part, de toute personne physique ou morale ayant un lien professionnel avec le lanceur d’alerte.

Concernant l’information révélée, le champ d’application est étendu aux tentatives de dissimulation d’une violation d’un engagement international et à la violation du droit de l’Union européenne. La caractère « grave et manifeste » de la violation n’apparaît donc plus comme condition. Les exclusions classiques du secret de la défense nationale, du secret médical et du secret avocat-client, sont enrichies avec le secret des délibérations judiciaires, le secret de l’enquête et de l’instruction judiciaire.

Concernant la forme de l’alerte, la hiérarchisation des canaux de signalement est simplifiée :

  • En première intention, le lanceur d’alerte peut choisir entre le canal interne (l’entreprise ou l’administration dans laquelle il travaille), et le canal externe (l’autorité administrative ou judiciaire, l’ordre professionnel). Le canal externe doit accuser réception de l’alerte dans un délai de sept jours. Un décret à venir imposera un délai de réponse au lanceur d’alerte de trois mois, et précisera la liste des autorités compétentes pour recueillir et traiter les alertes;
  • La divulgation au public peut intervenir en cas d’absence de traitement du signalement par le canal externe dans le délai précité, en cas de risque de représailles, de « danger grave et imminent », ou de « danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général » pour les informations obtenues dans un cadre professionnel.

Concernant les effets de l’alerte, la réforme renforce la protection accordée au lanceur d’alerte :

  • Le lanceur d’alerte bénéficie d’une immunité tant civile que pénale ;
  • Toute personne personne qui tente d’empêcher le signalement d’un lanceur d’alerte encoure une amende civile de 60.000 euros. En cas de procédure judiciaire pour des représailles contre le lanceur d’alerte ou de tentative de faire échouer son signalement, le juge peut accorder au lanceur d’alerte une provision sur les frais de justice en fonction de la situation économique respective des parties et du coût prévisible de la procédure, ou une provision visant à couvrir ses subsides lorsque sa situation financière s’est « gravement dégradée » en raison du signalement ;
  • Le lanceur d’alerte peut également bénéficier de mesures de soutien psychologique et financier de la part des autorités externes. 

La loi Waserman entrera en vigueur le 1er septembre 2022, étant rappelé que certaines de ses dispositions sont subordonnées à la parution ultérieure d’un décret d’application. On peut d’ores et déjà anticiper que ce nouveau cadre fixé au statut de lanceur d’alerte a des conséquences multiples en droit pénal, ce qui fera l’objet d’un 4e et dernier billet d’actualité.

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