DROIT D’AUTEUR – Prescription de l’action en contrefaçon malgré une mise en ligne et une commercialisation du titre contrefaisant toujours en cours au jour de l’assignation

Type

Veille juridique

Date de publication

7 décembre 2023

CA Paris, 17 mai 2023, 21/15795. La Cour d’appel de Paris a rendu un arrêt dans lequel elle a jugé que la prescription de l’action en contrefaçon est acquise au bout de cinq ans, peu important que des actes de commercialisation et de diffusion de l’œuvre litigieuse se poursuivent au-delà.

L’œuvre musicale « Un Monde Sans Danger » a été créée par deux auteurs-compositeurs pour constituer le générique du dessin animé « Code Lyoko ». Ces derniers ont estimé qu’un album réalisé en 2010 par deux artistes-interprètes membres du groupe « The Black Eyed Peas »  reprenait la mélodie de leur œuvre dans leur titre « Whenever ».

En décembre 2011, ces derniers ont mis en demeure les artistes-interprètes d’avoir à réparer le préjudice subi du fait de la contrefaçon. Cependant, ce n’est que le 6 juin 2018 que les auteurs-compositeurs ont finalement assigné en justice les artistes-interprètes et les sociétés distributrices et productrices de l’album  sur le fondement de la contrefaçon de droits d’auteur.

Le jugement de première instance a écarté le moyen tiré de la prescription soulevé par les défendeurs mais déclaré irrecevables les demandeurs faute d’avoir justifié de l’originalité de l’œuvre revendiquée.

Les auteurs-compositeurs ont interjeté appel de la décision.

Sur la question de la prescription, les appelants considéraient que l’action en contrefaçon de droit d’auteur est de nature pénale « qui prévoit la possibilité d’une infraction continue, d’un délit successif » et que l’achat d’un album « The Beginning » à la FNAC le 27 avril 2018 quelques jours avant l’assignation démontre que l’œuvre litigieuse était bien distribuée au public ce qui était de nature à interrompre la prescription.

Les intimés considéraient quant à eux que la demande était prescrite au plus tard depuis décembre 2016 dès lors que les appelants avaient nécessairement eu connaissance de la commercialisation du titre « Whenever » dès 2010, ce qui était établi par l’envoi d’une mise en demeure datée du 30 décembre 2011 et que les agissements postérieurs à cette date, tels que la mise à disposition du titre le 27 mars 2018 sur la plateforme ITunes ou la vente d’exemplaires physiques de l’album à la FNAC le 27 avril 2018, n’étaient pas des actes distincts de contrefaçon car ils n’étaient que le prolongement de la commercialisation du titre en 2010.  

La Cour d’appel a finalement infirmé le jugement, en rappelant tout d’abord que l’action en contrefaçon de droit d’auteur est « soumise à la prescription de droit commun de l’article 2224 du Code civil ». Elle a ensuite validé le raisonnement des intimés en jugeant qu’au jour de l’assignation le 6 juin 2018, la prescription quinquennale était acquise puisque les appelants avaient eu connaissance des faits litigieux à la date de la mise en demeure de décembre 2011.

La Cour a alors estimé que la mise à disposition du titre sur la plateforme ITunes et la vente d’exemplaires physiques de l’album à la FNAC en avril 2018 n’étaient « que le prolongement normal de la commercialisation et de la diffusion réalisées antérieurement », ce qui ne faisait pas courir un nouveau délai de prescription.

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