L’application stricte des conditions d’engagement de la responsabilité pénale de la personne morale

Type

Droit Pénal

Date de publication

17 novembre 2014

L’IDENTIFICATION DE L’ORGANE OU REPRÉSENTANT AYANT AGI POUR LE COMPTE DE LA PERSONNE MORALE – CRIM. 1ER AVRIL 2014, N°12-86.501 & CRIM. 6 MAI 2014, N°13-82.677

L’article 121-2 du code pénal dispose que « les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ». La question s’est posée de savoir s’il fallait identifier clairement l’organe ou le représentant qui avait agi afin d’appliquer ces dispositions.

La jurisprudence de la Cour de cassation, connaissant son apogée en 2006, a un certain temps admis que l’on impute l’infraction à la personne morale en présumant la participation de l’organe ou représentant, sans les identifier. Cette présomption se basait sur l’idée que « l’infraction n’avait pu être commise que par un organe ou représentant ».

Par une suite d’arrêts, la haute juridiction est revenue sur sa jurisprudence. Elle exige donc, respectant la lettre du texte, que l’on identifie l’organe ou le représentant qui a agi pour le compte de la société, ce afin d’engager sa responsabilité.

Peu avare de revirements ou de nuances, la Chambre criminelle avait par la suite développé un raisonnement pouvant s’apparenter à une présomption d’identification de l’organe ou représentant impliqué. Le 18 juin 2013, elle admettait que l’infraction soit imputée à la personne morale dès lors qu’en l’absence de délégation de pouvoir seul le président, responsable de la sécurité, pouvait l’avoir commise. On pouvait dès lors se demander si, en cas de faits simples, ne mettant pas en jeu une multitude de responsables, l’imputation pouvait se faire par déduction, sans identification précise.
Les arrêts du 1er avril 2014 et du 6 mai 2014 semblent mettre fin à cette nuance.

Dans le premier arrêt, la Cour d’appel avait condamné une société pour contrefaçon de dessins et modèles, infraction intentionnelle, sans avoir cherché à savoir si l’infraction avait été commise par un organe ou un représentant de l’entreprise. La Cour de cassation censure cet arrêt pour ne pas avoir relevé « par quel organe ou représentant le délit reproché à la personne morale avait été commis pour son compte ». Elle impose ainsi aux juges du fond, ce de façon très claire, d’identifier précisément l’organe ou le représentant agissant pour le compte de la personne morale.

Dans la seconde espèce, un ouvrier tombait dans une cuve remplie d’un produit chimique et se brulait grièvement. La société pour laquelle il effectuait les travaux n’avait pas installé l’équipement pour assurer la sécurité nécessaire des ouvriers. Il y avait en outre une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. Les juges du fond retenaient la responsabilité de la personne morale en précisant qu’il était inutile de déterminer la personne physique coupable, qui avait agi comme organe ou représentant de ladite société et pour le compte de celle-ci. Cette décision est cassée au motif que les juges auraient dû rechercher « si les manquements [constatés], relevaient de l’abstention de l’un des organes ou représentants de la société prévenue et s’ils avaient été commis pour le compte [de celle-ci] ».

L’exigence d’identification est ainsi rappelée avec force dans ces arrêts, même dans le cas de faits relativement simples, comme c’est le cas dans l’arrêt du 6 mai 2014.

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