Précision sur la qualité et l’intérêt à agir pour contester la régularité d’une perquisition

Type

Droit Pénal

Date de publication

27 janvier 2016

L’ABSENCE DE SIGNATURE DU PROCÈS-VERBAL PAR LES DEUX TÉMOINS NE PEUT ENTRAINER LA NULLITÉ QUE SI LE REQUÉRANT PROUVE QU’IL DISPOSE D’UN DROIT SUR LE LOCAL PERQUISITIONNÉ

CASS. CRIM., 14 OCTOBRE 2015, N°15-81765

L’arrêt rendu le 14 octobre 2015 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation s’inscrit dans une jurisprudence constante mais relativement récente par laquelle celle-ci exige que le demandeur à la nullité ait subi personnellement une atteinte au droit protégé lié à la violation d’une règle de droit. Ainsi, en matière de garde à vue, seule la personne ayant fait l’objet de la garde à vue irrégulière dispose de la qualité nécessaire pour en soulever la nullité.

Il est toutefois intéressant de signaler cette nouvelle décision qui, appliquée à une mesure de perquisition, abouti à une solution particulièrement critiquable.

En l’espèce une perquisition avait eu lieu dans un local d’habitation, suite à une expulsion dont la régularité n’avait pas été contestée. L’occupant étant absent, les policiers ont désigné deux témoins pour assister à la perquisition, conformément aux dispositions du Code de procédure pénale. Or le procès-verbal de la perquisition joint au dossier de la procédure ne comporte par la signature de ces deux témoins, signature qui fait pourtant partie des formalités prévues à peine de nullité par le Code de procédure pénale.

Au cours de l’opération de perquisition sont trouvés des éléments permettant la mise en cause de plusieurs individus, mais dont aucun ne peut revendiquer un droit sur ledit local (propriété, location, etc.).

Saisie d’une requête en nullité de la perquisition, la Chambre de l’instruction rejette la requête au motif que le procès-verbal non signé n’est que la retranscription du procès-verbal manuscrit dressé au cours de la perquisition, et demeuré introuvable, mais dont un procès-verbal de synthèse précise qu’il a été signé par les témoins.

Saisie d’un pourvoi, la Chambre criminelle ne répond pas sur la question de la perte du procès-verbal original, et se contente de rappeler que les demandeurs à la nullité étaientirrecevables à soulever l’irrégularité de la perquisition en ce que ces demandeurs ne pouvaient se prévaloir d’aucun droit sur le local dans lequel les opérations avaient été effectuées (en d’autres termes l’irrégularité n’aurait pu être invoquée que par le locataire du local ou son propriétaire).

Cet arrêt s’inscrit donc dans le sens de l’interprétation jurisprudentielle controversée de l’article 802 du code de procédure pénale par laquelle la Cour considère que la nullité ne peut être prononcée que lorsqu’elle a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne.

Cette interprétation restrictive est particulièrement critiquable lorsqu’elle est appliquée à une mesure de perquisition dès lors qu’elle revient à considérer que les règles de procédure relative à la perquisition ne visent qu’à protéger l’inviolabilité du domicile. Or les règles relatives à la présence de deux témoins ont pour objet de s’assurer du bon déroulement de la perquisition et des opérations de saisies, les biens saisis pouvant d’ailleurs tout à fait appartenir à des tiers ou mettre en cause ces derniers.

De ce fait il aurait été semblé plus rigoureux de considérer que la présence de deux témoins a pour objet de protéger les droits de la défense, et ouvrir ainsi la voie de la requête en nullité à toute personne mise en cause du fait des éléments, biens et informations récoltés au cours des opérations de perquisition.

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